mardi 02 juin 2009

Les images mentales : pour accélérer et réussir le changement dans les organisations d’aujourd’hui

Changement ? Même ce mot semble dépassé par les mutations que nous vivons tant elles sont rapides, multiples, dissonantes. Conduire le changement devient quasiment la tâche quotidienne prioritaire des managers.

Dans ce contexte d’incertitude, un hiatus apparaît de plus en plus grand entre des méthodes établies de conduite du changement demandant du temps et les réalités opérationnelles et sociales des entreprises.

Faut-il rejeter toute méthode et faire confiance au seul bon sens ?

Il existe des pratiques simples et très efficaces, permettant de clarifier les repères, de donner du sens, de faciliter les consensus, des pratiques fondées sur la psychologie cognitive : les images mentales.

Imaginer le changement ?

Face à tout projet de changement, se pose un dilemme : comment puis-je me fixer les objectifs vers une situation future que je ne peux même pas imaginer ?
• A partir de mon point A actuel, quel est le point B vers lequel je tends ?
• Quel sera le chemin pour m’y rendre ?
• Comment puis-je visualiser la construction et l’aboutissement de mon projet ?
Nous agissons de préférence selon notre réflexion intellectuelle : à côté du mental, pouvons-nous mobiliser d’autres formes d’intelligence qui deviendront une intelligence de partage collaboratif ?

La carte : l’outil essentiel de nos voyages

La carte routière me donne une vision simple de la richesse infinie des chemins et des paysages d’ici vers là-bas : comme le choix de la route pour aller à Dubrovnik ou en mer pour joindre Ushuaïa.

Et pour mener à bien son rôle de guide, la carte est une simplification du réel : elle me permet de comprendre le complexe et d’en construire les déductions qui feront ma décision et mon agilité pour prospérer dans mon écosystème.

Transposons la carte routière à notre vie quotidienne : la représentation que je me fais du monde qui m’entoure détermine comment je perçois les choses, quelles sont les possibilités qui me sont accessibles et quelle sera mon expérience de la vie.

Nous vivons dans plusieurs mondes :
• Le monde géographique par les continents et les pays,
• Le monde professionnel par nos projets d’efficacité et de pérennité,
• Le monde personnel par la quête et le partage des valeurs qui font ce que nous sommes.

C’est la vision holistique, c’est-à-dire globale, de mon écosystème personnel !

Pour ces trois dimensions, la carte du monde la plus utile n’est ni la plus précise ni la plus réelle : c’est celle qui met à ma disposition le plus de choix possibles pour choisir ma route et construire mon projet.

L’image : une autre forme d’intelligence !

Lors de l’émergence puis de l’engagement du projet se posent quelques questions de fond que nous abordons de façon rationnelle et intellectuelle : quel est le résultat visé par mon projet ? quelles seront ses contraintes ? quels facteurs seront ses leviers d’efficacité ? comment accompagner et faciliter son parfait accomplissement ?…

Comme l’analyse Howard Gardner, plusieurs formes d’intelligence sont à notre disposition pour construire notre relation au monde.

A côté de notre capacité d’abstraction et de raisonnement, une autre forme quotidienne d’intelligence est l’intelligence spatiale ou visuelle : celle de l’image (souvent dans le propre sens du dessin sur un papier) que nous nous projetons de ce que pourrait être la réalité. Il est intéressant d’observer que le siège de cette forme d’intelligence est logé dans l’hémisphère droit du cerveau, domaine du Conceptuel, du Sensoriel, du Non verbal et de l’Intuitif, les différents ingrédients qui concourent à la créativité.

De la carte qui nous guide dans nos déplacements, nous passons à son parallèle immédiat : l’image mentale qui nous guide en management collaboratif, marqué par l’intensité des échanges sur de multiples sujets, avec de multiples partenaires co-opérateurs.

L’image mentale est la représentation que nous nous faisons d’un évènement, d’une situation, d’une personne ou d’un objet. Elle me fait vivre par anticipation le projet que je n’ai pas encore commencé : et cette réalité future va guider ma stratégie ici et maintenant. Comme toutes les cartes routières, les images mentales sont par définition incomplètes ou périmées ; néanmoins, elles constituent les meilleures informations dont nous disposons sur la réalité.

Mais toujours voir les choses de ses propres yeux est nécessairement limitant : partager les points de vue, changer la position de mon regard me permettra de changer ma vision du monde, de gagner en perspective et de mieux préparer mes décisions.

L’image est un recadrage : au-delà de la lumière douce du réverbère personnel qui dessine mon univers familier, elle ouvre d’autres dimensions, d’autres possibles de choix d’actions. L’image, comme la métaphore, fait sortir du cadre de mes pensées, de mes croyances :

Elle m’invite à explorer de nouvelles interprétations. Elle est facteur de clarification, d’échange, de passage de la suggestion à l’idée et de l’idée au projet : elle me permet de mieux comprendre mon interlocuteur, elle alimente l’intelligence collective et, par la force de l’analogie créative, elle est un puissant facilitateur d’innovation collaborative.

L’image pour comprendre

Face au dilemme d’un projet complexe, l’image mentale me permet de découvrir et d’étudier les caractéristiques et les composantes de la situation que je vise. Ainsi que les motivations qui vont m’y conduire et les difficultés que je vais rencontrer. Par l’échange et la valorisation de tous par tous, elle contribue à l’organisation apprenante.
Face à une situation donnée, l’image n’est pas le reflet de la réalité : l’important est qu’elle soit une représentation « possible » du réel : je vais me l’approprier et, à partir de cet instant, je ne peux pas ignorer cette image et ne pas savoir ce que désormais je sais. Elle devient une partie de ma vision du monde qu’elle va influencer et enrichir, ne serait-ce qu’en déclenchant une autre image qui me rapprochera de mon projet personnel.

L’image mentale structure et guide la compréhension de mon futur.

C’est le principe de fonctionnement des communautés et des réseaux collaboratifs :partager une vision, une image commune dans laquelle chacun apporte et s’enrichit par l’apport des autres.

L’image pour agir

Dans une vision déterministe de la vie, on pose que les causes précèdent les effets. Mais dans le monde des humains, ce n’est pas nécessairement le cas.

Paradoxe du « Comme si » et de l’analogie : on peut gérer un évènement en le visualisant comme s’il s’était effectivement produit !

Pour simplifier notre vision du réel, il est utile d’adopter certaines hypothèses comme si elles étaient vraies, même s’il n’a pas été prouvé qu’elles soient effectivement vraies.

On entre ainsi dans un élan de concordance, pour viser l’accord de notre réalité d’aujourd’hui avec les objectifs induits par l’image positive qui nous a donné une représentation souhaitable de notre demain.

Croyances et valeurs donnent du sens à ce que nous percevons et c’est en fonction de ce sens que nous allons nous orienter dans le présent.

L’image que je me fais du futur me conduit à décider d’agir ou de ne pas agir : je me projette dans ce futur et je mobilise en conséquence mes ressources dans le présent.

Image, objectif, comment faire…

Au-delà de la pure logique, nous sommes ici dans le triptyque Emotion-Pensée-Comportement.

Trois pôles en interaction dynamique permanente : une modification de l’un implique un réaménagement des deux autres.

Par l’image mentale aux niveaux Emotion et Pensée, nous engageons une évolution des Comportements vers la résistance ou l’action.

L’image est un déclencheur remarquablement puissant vers l’objectif et l’action, notamment ceux des projets innovants qui doivent passer de l’idée brumeuse à la création de valeur tangible !

Tout projet innovant pose des enjeux complexes : l’entreprise doit savoir identifier et gérer ces enjeux pour engager une dynamique collaborative appuyée sur l’animation d’une combinaison de personnes, de communautés humaines et de réseaux techniques.

C’est sur ces fondements qu’In Principo développe depuis 2002, une démarche globale de Conduite du Changement Collaborative : le principe en est de co-construire avec les parties prenantes un référentiel de représentations pertinentes associés à un ensemble de pratiques et des comportements adaptés. Ils assurent dans un délai court la mobilisation durable des acteurs de l’organisation et la production rapide de résultats tangibles.

— Claude Nègre