jeudi 01 octobre 2009

Le modèle collaboratif de l’Open Source appliqué à l’entreprise : à quand “l’Open Entreprise” ?

L’Open World Forum 2009 marque un tournant dans la prise en compte du phénomène Open Source. Celui-ci ne constituerait pas seulement un mode de développement logiciel mais un modèle d’organisation dont l’entreprise pourrait s’inspirer.

En cela, le mouvement Open Source rejoint le credo déjà partagé par un grand nombre : nous quittons le monde de l’organisation hiérarchique – command and control - pour entrer dans un nouveau monde plus foisonnant, plus créatif, plus riche humainement. En cela aussi, le mouvement Open Source décline à sa manière les mots : participatif, collaboratif, 2 ou 3.0, communautés, crowdsourcing, etc.

Un discours de plus ? Non. La prétention du mouvement Open Source est ici quelque peu différente. Le phénomène Open Source nous montre qu’à grande échelle et dans une grande diversité de situations, il est possible de créer de la valeur dans des systèmes complexes, tout en leur permettant d’être évolutifs, de s’adapter et de se diversifier même, tout en conservant leur cohérence. Par son fonctionnement pleinement collaboratif, l’Open Source aujourd’hui performe tant dans son utilisation que sur le plan économique.

L’Open Source a désormais légitimité pour convaincre les acteurs de l’organisation classique qui jusque-là n’avaient culturellement et intellectuellement aucune lisibilité sur le phénomène collaboratif.

Comment l’open source y arrive et en quoi l’entreprise d’aujourd’hui pourrait-elle décider d’en tirer vraiment parti ?

Comment l’Open Source réussit à travers de nouveaux modèles d’organisation ?

Pourquoi ? Parce que la force de l’open source est d’avoir fait un choix de modèle dans ces nouvelles formes d’organisation. L’open source n’est pas seulement foisonnant ou participatif, il est collaboratif.

C’est à dire qu’à la participation s’ajoute systématiquement une gouvernance. Pas une gouvernance d’en haut mais une gouvernance répartie dans l’organisation.

La gouvernance, c’est la capacité d’un groupe d’individus à maitriser leur orientation, leurs objectifs, les risques, les ressources dans un esprit responsable. La gouvernance, c’est la capacité de décider entre parties prenantes.

L’Open Source a réussi à décentraliser cette question de manière à la fois parcellaire et collective dans une organisation répartie. La participation permet de collecter une grande diversité d’options, de travaux, de propositions. La gouvernance permet de faire des choix assumés par les parties prenantes concernées, chacun étant conscient de l’intérêt du tout et de sa partie. Cette gouvernance s’opère à différents niveaux pour différents niveaux d’enjeu. Pour autant, n’allons pas trop vite, l’open source n’est pas un modèle parfait en ce sens mais il faut reconnaitre que c’est un modèle qui marche, qui “délivre”, qui s’améliore sous différentes formes au fil des années !

Et c’est un modèle qui permet de délivrer beaucoup, avec une forte inventivité et des coûts moins élevés. La proposition de valeur organisationnelle de l’Open Source est d’avoir su répondre à la croissance du couple complexité-temps (toujours plus complexe, plus rapidement), par une intelligence répartie dans l’organisation.

La proposition de valeur organisationnelle de l’Open Source est d’avoir su répondre à la croissance du couple complexité-temps (toujours plus complexe, plus rapidement), par une intelligence répartie dans l’organisation.

En quoi les organisations d’aujourd’hui pourraient-elles s’en inspirer vraiment ?

Alors pourquoi toutes les organisations confrontées à cette même tendance ne s’en inspirent-elles pas ?
La méfiance des organisations classiques, entreprises, administrations, vis à vis de ces nouvelles formes de management n’est pas seulement culturelle comme on le croit souvent, elle est aussi liée à un manque de lisibilité du modèle et à une certaine guerre des mots.

Quand les aficionados du collaboratif présentent leur approche, ils mettent toujours en exergue le coté participatif, “le nombre qui peut tout faire”. Les managers classiques s’affolent : Comment contrôle-t-on un tel système ?

Certains lisent derrière le mot “contrôle”, le mot “pouvoir”, là où d’autres placent le mot “responsabilité”. Répartir la responsabilité est une bonne idée dans les organisations classiques mais pas répartir le pouvoir.
Et cela fait toute la différence ! Cela rend possible le passage d’un modèle à l’autre, du modèle “Command and Control” au modèle “management collaboratif”, sans traumatisme, c’est à dire sans perte de repère. La proposition de valeur d’une organisation collaborative à un dirigeant devient : “dans un monde toujours plus complexe et rapide, pour ne rien perdre en pouvoir, je répartis la responsabilité”.

La proposition de valeur d’une organisation collaborative à un dirigeant devient : “dans un monde toujours plus complexe et rapide, pour ne rien perdre en pouvoir, je répartie la responsabilité”.

Participation et gouvernance, composantes de l’organisation intelligente

Dès lors, pour répondre aux enjeux des organisations d’aujourd’hui, qui se doivent plus encore d’être plus efficientes, plus agiles et plus innovantes, le management collaboratif devient vertueux et compréhensible par les acteurs des organisations.

Le manager qui a engagé ce mouvement, non seulement reste en controle des responsabilités réparties mais en maitrise le sens. C’est le manager porteur de sens décrit par Vincent Lenhardt.

Pour conserver la cohérence de son organisation, il doit passer à un registre supérieur, devenir en quelque sorte un “meta manager” qui maitrise les conditions des dynamiques collaboratives qu’il a permises.

L’organisation animée de flux et de dynamiques collaboratives développe une intelligence globale très nettement supérieure à la somme de ses parties : force de proposition, puissance de composition (assemblage et sélection d’idées pertinentes), pertinence de décision par la gouvernance, accélération de mise en œuvre, engagement des acteurs à réussir.

L’organisation est plus performante opérationnellement et elle est aussi naturellement plus humaine, plus sociale, plus sociétale.

Force est de constater qu’il y a moins, dans l’Open Source, de contradiction entre humanité et performance économique car il y a plus d’intelligence et d’accomplissement individuel et collectif. Déjà différentes approches concrètes du management inspirée de la collaboration open source sont déjà à l’œuvre : communautés de pratiques, innovation collaborative, open innovation.

L’Open Source a beaucoup à apporter à l’entreprise. Au-delà du développement logiciel produit par le collaboratif, c’est potentiellement le collaboratif lui-même qui sera sa prochaine contribution à l’entreprise.

Et quel nom pour ce concept ? Si, si, il en faut un… Le web 2.0 participatif a donné entreprise 2.0…
Alors pour l’entreprise inspirée de l’Open Source … nous pouvons proposer le terme : “Open Entreprise” ?

— Olivier Réaud