mercredi 05 janvier 2011

2011, l’année des mutations intelligentes

En 1980, la microinformatique naissante, la robotique, l’accélération de l’innovation technologique, nous laissaient espérer un monde à la fois plus simple et plus prospère.

En 1980, il nous restait à dépasser deux enjeux planétaires : le conflit Est-Ouest et les inégalités Nord- Sud.

Nos espoirs se sont en grande partie concrétisés pour engendrer paradoxalement un monde plus complexe à vivre au quotidien sur une planète ou les défis planétaires se sont multipliés et accrus : géopolitique multipolaire, instabilité financière croissante, surpopulation et vieillissement, hypertrophie urbaine, ruptures énergétiques, réchauffement climatique, mise en péril de notre environnement naturel.

Les acteurs clés de la planète se sont quasiment tous convertis au « green ». Les discours enflammés font place à des tentatives d’actions qui paraissent insignifiantes et renforcent le sentiment d’impuissance.

Le politique n’a pas les leviers économiques, les acteurs économiques isolément n’ont pas la capacité de changer la donne. Les ONG réussissent sur la prise de conscience mais ne changent qu’à la marge le court du fleuve. Le citoyen peut pétitionner tant qu’il le peut, la planète n’est pas encore un collectif intelligent capable d’agir en regard de ses propres enjeux.

La crise, les crises, ont ajouté au pessimisme et renforcé le court termisme : « Vous comprenez, c’est la crise, il y a urgence, nous naviguons à vue : il n’est plus temps de regarder à long terme ! ».

Et si c’était l’inverse ? Et si ces défis planétaires constituaient une formidable opportunité de résoudre les problèmes autrement ?

Il y a crise (s) car nous n’avons plus pris le temps de regarder à long terme. Preuve ? Les pays, les entreprises, qui s’en sortent sont ceux qui ont une vision, une singularité et qui l’assument. Comment être intelligent dans l’action si nous ne pensons pas l’évolution du système dans lequel nous sommes ? Si nous ne dominons pas la complexité du monde qui nous entoure ? Si nous ne l’anticipons pas pour mieux l’infléchir ? Si nous ne préparons pas notre futur, il ne nous reste effectivement qu’à le subir.

D’accord, penser le long terme est le début de la solution. Mais comment passer à l’action ? En agissant seul, le politique, l’entreprise, l’ONG, le citoyen, nous l’avons dit plus haut, demeurent impuissants. Regardons à nouveau ceux qui s’en sortent. Les Apple, Google, Illiad, Procter et Gamble, les acteurs de l’Open Source : ils réussissent à mobiliser conjointement deux leviers concrets : l’innovation et la collaboration.

L’innovation pour faire face aux nécessaires mutations. La collaboration car il s’agit d’être plus intelligent que la complexité que nous engendrons.

C’est Gilles Martin que nous a fait connaître Olivier Zara en reprenant son article dans son blog qui a formulé le premier l’idée simple que notre réelle intelligence dépasse depuis longtemps celle de notre cerveau. Notre cerveau d’aujourd’hui nous dit-il est à peine plus développé que celui de l’homme de Cro-Magnon, ce qui fait la différence, c’est notre intelligence collective.

“Ce qui fait fonctionner la société humaine n’est pas la taille du cerveau des individus mais celle de notre cerveau collectif. Presque toutes les technologies dont nous nous servons, du crayon à la ville, échappent à la compétence d’un individu. (…). Tout ce que nous utilisons aujourd’hui combine des idées différentes, est produit par de nombreuses personnes et échappe au savoir de l’individu.

Quand nous avons commencé à échanger et à nous spécialiser, il y a environ 100 000 ans, nous avons, sans le savoir, commencé à créer un cerveau collectif, dans lequel nous ne sommes que les nœuds d’un réseau. Les réalisations de ce cerveau collectif sont plus brillantes que tout ce que nous pouvons comprendre. C’est pourquoi la planification centralisée ne peut pas marcher. Nous ne pouvons pas utiliser nos cerveaux individuels pour expliquer au cerveau collectif ce qu’il doit faire.

C’est là que se loge le secret de l’explosion de la prospérité et du progrès humains que l’on observe depuis 100 000 ans et encore aujourd’hui.”

Ce qui est nouveau aujourd’hui, c’est que nous prenons conscience de notre intelligence collective en même temps que de la nécessité d’innover pour passer d’un stade de civilisation à un autre, pour répondre à ce cumul d’enjeux planétaires de manière intelligente.

Arrivé à ce stade de lecture, vous êtes en droit de vous dire que cela fait encore plus de défis à relever. Répondre aux enjeux planétaires, penser le long terme, collaborer, innover … Un seul de ces items impliquerait une mutation considérable de ce que nous sommes. Oui, vous avez raison ! Mais là où il y a une fantastique opportunité, c’est que les quatre items, ensemble, se conjuguent pour devenir parfaitement possibles !

Penser le long terme pour motiver des projets à court terme entre plusieurs acteurs portés par cette finalité long terme, donc hautement mobilisateur en terme de collaboration et d’innovation.

Les collaborations se fédèrent plus facilement sur des objectifs à long terme, clairs en terme de sens et non dissonants avec les priorités de chacun. Un collectif est d’autant plus innovant qu’il se projette sur le long terme. La collaboration permet à plusieurs parties prenantes d’innover plus rapidement ensemble et de dégager des gains à court terme. L’innovation et la collaboration en se conjuguant donnent l’innovation ouverte ou open innovation. L’innovation ouverte entre dans un cercle vertueux servant des finalités de long terme sociétale et l’intérêt à court terme de ses parties prenantes. Il est ainsi possible de gérer ces mutations de manière intelligente. Intelligente car rendue plus pertinente par la collaboration d’un nombre large d’acteurs, intelligente car elle mobilise sur le sens donc avec une haute implication des acteurs, intelligente car elle permet de construire le long terme de tous en satisfaisant le court terme de chacun.

C’est ce que nous appelons les mutations intelligentes. Des mutations initiatives souhaitées par des parties prenantes légitimes, des entreprises de tailles diverses conjuguant puissance d’action et capacité d’innovation, des instances politiques, des ONG, des citoyens se mettant au service du succès d’une initiative, la rendant plus pertinente, plus rapide, plus puissante.

Jusqu’à présent les initiatives semblaient toujours au service d’un acteur privilégié et donc suspect. La perspective du succès de celle-ci devenant dès lors un frein. D’où un nombre d’échecs plus qu’élevés.
Ces mutations intelligentes sont nécessaires et sont possibles. Elles sont mêmes urgentes pour la planète comme pour nos économies et même chacune de nos entreprises.
Abeilles Symbole d’Intelligence Collective
Ces mutations intelligentes sont nécessaires et sont possibles. Elles sont mêmes urgentes pour la planète comme pour nos économies et même chacune de nos entreprises.

Par l’évidence de ce modèle autant que par l’impossibilité patente du précédent, nous croyons que nous entrons dans la décennie des mutations intelligentes et que 2011 sera bel et bien l’année 1 des mutations intelligentes.

Ces mutations intelligentes nécessitent quelques éléments de méthode et surtout des contextes favorables.

In Principo a fait le choix de soutenir l’initiative Planète du 3e Millénaire portée depuis un an par un collectif d’industriels, de prospectivistes, d’économistes, d’innovateurs, d’ingénieurs, de consultants comme espace de fertilisation, d’incubation et de facilitation de ces mutations intelligentes.

Planète du 3e Millénaire se définit à ce titre comme un Action Tank. Oui, Action Tank. Si les Think Tank permettent de faire murir les idées, la pensée, les prises de conscience, aujourd’hui, il nous faut des espaces à même de faire émerger l’action.

De la prospective pour engendrer l’action, des contextes accompagnés pour favoriser l’émergence d’initiatives multi parties prenantes, de mutations intelligentes !

Première manifestation en 2011 de Planète du 3e Millénaire pour le développement des mutations intelligentes, « Dessine moi une planète », une journée exceptionnelle pour engager concrètement la démarche avec de grands industriels, des innovateurs, des acteurs de projets : de la prospective aux projets multi acteurs dans 3 domaines stratégiques de mutation : l’énergie, la ville, l’alimentaire.

Que 2011 soit pour vous une excellente année, pleine de bonheurs à partager et de contributions innovantes aux mutations que nous savons tous plus que nécessaires !

Au nom de toute l’équipe d’In Principo, je vous souhaite une excellente année !

— Olivier Réaud